Affaire Mediator : retour sur les étapes charnières

12.04.2021

Droit public

Dans l'affaire du Mediator, le tribunal correctionnel de Paris reconnaît les délits de tromperie aggravée, d’homicides et blessures involontaires, mais prononce la relaxe pour l’escroquerie et l’obtention indue d’AMM.

Le 29 mars 2021, la 31e chambre du tribunal correctionnel de Paris a rendu son jugement – d’environ 2000 pages – dans l’affaire du Mediator. Si la culpabilité de six sociétés du groupe Servier, ainsi que celle de son ancien directeur général, ont été retenues pour tromperie aggravée, homicides involontaires et blessures involontaires, le tribunal les a relaxés des chefs d’escroquerie et d’obtention indue d’autorisation de mise sur le marché.

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Le montant global des amendes s’élève à plus de 2,7 millions d’euros pour l’ensemble des sociétés du groupe (une peine de quatre ans d’emprisonnement avec sursis et un montant total de 90 000 euros d’amendes étant infligée à l’ancien directeur général).

L’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), dont la continuité juridique est assurée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), a été reconnue coupable d’homicides et de blessures involontaires et condamnée à une peine de plus de 300 000 euros d’amendes.

Des condamnations et des relaxes ont également été prononcées à l’encontre d’autres personnes, physiques et morales, qui étaient poursuivies pour des délits d’atteinte à la probité.

Le parquet de Paris, ainsi que plusieurs parties civiles, dont les caisses d’assurance maladie et des complémentaires santé, ont décidé d’interjeter appel de la relaxe partielle, d’une part, et du jugement civil, d’autre part. Les sociétés du groupe Servier et son ancien directeur général ont également décidé de relever appel du jugement. L’ANSM a indiqué ne pas faire appel de sa condamnation.

Rappel des faits à l’origine des plaintes

Le Mediator est le nom de marque d’un médicament exploité par la société Les Laboratoires Servier entre 1976 et 2009. Indiqué dans le traitement adjuvant de l’hypertriglycéridémie et du diabète, ce médicament est composé d’un principe actif, le benfluorex, molécule aux propriétés anorexigènes susceptible d’engendrer des effets nocifs sur le système cardiovasculaire (insuffisance aortique, valvulopathies, hypertension artérielle pulmonaire).

C’est à la suite de la publication, à l’été 2010, du livre d’Irène Frachon (Mediator 150 mg. Combien de morts ?) que le médicament s’est trouvé au cœur d’un scandale sanitaire, obligeant les pouvoirs publics à intervenir. Un rapport d’enquête de l’IGAS, rendu public le 15 janvier 2011, a mis en évidence le rôle des laboratoires Servier dans le maintien sur le marché de cette molécule nocive et la carence de l’autorité sanitaire (l’AFSSAPS) à suspendre ou retirer l’AMM du Mediator.

Des ateliers de travail ont été constitués par le gouvernement au cours de l’année 2011, en vue de réformer le système de contrôle et de surveillance des médicaments. Ces travaux ont conduit à l’adoption de la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011, qui a restructuré l’AFSSAPS (devenue l’ANSM) et instauré un dispositif de transparence des liens existant entre les professionnels et les industriels du secteur de la santé, visant à prévenir les conflits d’intérêts susceptibles d’influer sur les processus d’expertise et de décision (C. santé publ., art. L. 1451-1 et L. 1453-1).

Déclenchement de procédures et fondements des poursuites

Les premières plaintes pénales ont été déposées à l’automne 2010 auprès des TGI de Nanterre et de Paris. Devant la complexité de l’affaire, la procédure observée par voie de citation directe devant le TGI de Nanterre a été suspendue en 2013 (les dossiers étant joints à la suite d’une décision de la Cour de cassation du 29 octobre 2018, le tribunal de Nanterre constatant son dessaisissement le 18 janvier 2019).

L’ouverture d’une enquête préliminaire est décidée en décembre 2010 sous l’autorité du pôle santé publique du parquet de Paris. Elle est confiée à l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et la santé publique (OCLAESP) et, conjointement, à la division nationale d’investigations financières et fiscales (DNIFF). Une information judiciaire est ouverte, en février 2011, pour le concours d’infractions suivantes : tromperie, tromperie aggravée, prise illégale d’intérêt, participation illégale d’un fonctionnaire dans une entreprise contrôlée (pantouflage), ainsi que complicité et recel des délits liés à la probité. Une seconde information judiciaire est ensuite ouverte pour blessures et homicides involontaires.

Le 30 août 2017, une ordonnance des juges d’instruction décide de renvoyer 14 personnes physiques et 11 personnes morales devant la 31e chambre correctionnelle du TGI de Paris (devenu le tribunal judiciaire de Paris en 2020). Cinq personnes prévenues, dont le président-fondateur du laboratoire, sont décédées au cours de l’instruction ou avant l’ouverture du procès, qui s’est tenu de septembre 2019 à avril 2020.

S’agissant d’un dossier portant sur un médicament commercialisé depuis 1976, on rappellera que la responsabilité pénale des personnes morales ne saurait être recherchée pour des faits antérieurs au 1er mars 1994, date d’entrée en vigueur du nouveau code pénal de 1992.

Pour les principaux chefs de prévention (tromperie aggravée, homicides et blessures involontaires, escroquerie, obtention indue d’autorisation), il est reproché aux prévenus d’avoir masqué les propriétés anorexigènes du Mediator. Pour les délits de tromperie, d’homicides et de blessures involontaires, il est également reproché d’avoir dissimulé les liens entre la métabolisation exacte du benfluorex et les fenfluramines, ainsi que de ne pas avoir informé les médecins et les patients sur les risques connus et engendrés par ces métabolites toxiques (valvulopathies et hypertension pulmonaire artérielle).

Relaxes des chefs de trafic d’influence, d’escroquerie et d’obtention indue d’autorisation

Compte tenu des circonstances liées à l’état d’urgence sanitaire durant la dernière partie du procès, le volet relatif au trafic d’influence et à la complicité de trafic d’influence a été disjoint. Impliquant l’ancien directeur général du groupe Servier, un ancien directeur de l’INSERM et une ancienne sénatrice, ce dossier a fait l’objet d’un jugement distinct du tribunal, rendu le même jour.

La relaxe a été accordée aux trois prévenus, le tribunal correctionnel estimant que les éléments du dossier n’apportaient pas la preuve d’une infraction constituée par un abus d’influence visant à obtenir une « décision favorable », au sens de l’article 432-11 du code pénal.

Dans le jugement principal, le tribunal correctionnel a également prononcé la relaxe des chefs d’escroquerie et d’obtention indue d’autorisation au bénéfice des sociétés du groupe Servier et de son ancien directeur général.

Le délit d’escroquerie visé à l’article 313-1 du code pénal aurait consisté, de la part des prévenus, à tromper les caisses d’assurance maladie et les organismes d’assurance complémentaire ayant remboursé le Mediator, en dissimulant les propriétés anorexigènes du benfluorex afin d’obtenir l’obtention et le renouvellement quinquennal de son AMM dans les indications liées au diabète, condition nécessaire – mais pas suffisante – pour que le médicament soit pris en charge par les assurances sociales.

Dans la mesure où, en matière d’escroquerie, la prescription ne commence à courir qu’à partir de la dernière remise lorsque les manœuvres frauduleuses constituent, non pas une série d’escroqueries distinctes, mais une opération délictueuse unique, c’est la date du dernier remboursement (décembre 2009) qui a été retenue comme point de départ du délai, le délit n’étant donc pas prescrit.

Après avoir examiné les conditions juridiques et les évolutions de la prise en charge du Mediator ainsi que la fixation de son prix – les juges confondant au passage service médical rendu (SMR) et amélioration du service médical rendu (ASMR) – le tribunal a considéré que la dissimulation des propriétés anorexigènes du benfluorex ne saurait constituer, en elle-même, une manœuvre frauduleuse de nature à caractériser l’élément matériel de l’escroquerie, la dissimulation n’étant pas jugée suffisamment déterminante, dans la mesure où elle n’a pas empêché la Commission de la transparence de proposer, par trois fois, le déremboursement du médicament (on précisera que l’inscription d’un médicament sur la liste des spécialités remboursables est décidée par l’autorité ministérielle, après un avis de la commission dépourvu de portée contraignante).

S’agissant de la prévention consistant en l’obtention indue d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) et le renouvellement de cette autorisation par des moyens frauduleux, en l’occurrence la dissimulation des propriétés anorexigènes du principe actif du Mediator, la relaxe a été prononcée en raison de la prescription de l’action publique.

Relevant de la catégorie des infractions de faux, l’obtention indue d’un document administratif visée à l’article 441-6 du code penal est un délit instantané pour lequel la prescription triennale est décomptée à partir du jour de sa commission (la prescription de l’action publique a été portée à six ans en matière de délits depuis la loi n° 2017-242 du 27 février 2017).

En l’espèce, le tribunal a constaté que l’action publique était éteinte à la date du 22 avril 2010, soit trois ans après la date du dernier renouvellement de l’AMM du Mediator (l’ouverture par le parquet d’une enquête préliminaire susceptible d’interrompre le délai de prescription datant de décembre 2010).

Condamnations pour tromperie aggravée

A l’instar des affaires du sang contaminé – dans laquelle la prévention sera retenue et confirmée (Cass. crim., 22 juin 1994, n° 93-83.900) – et de l’hormone de croissance, dans laquelle une relaxe générale sera prononcée, malgré une cassation partielle sur les intérêts civils (Cass.  crim., 7 janv. 2014, n° 11-87456) – le cœur du dossier du Mediator concernait le délit de tromperie prévu à l’article L. 213-1 du code de la consommation (devenu article L. 441-1 depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016).

Lorsqu’elle a eu pour conséquence de rendre l’utilisation d’une marchandise dangereuse pour la santé humaine, il s’agit d’une tromperie aggravée, pour laquelle les peines – applicables à l’époque des faits – peuvent être doublées (elles ont été portées à sept ans d’emprisonnement et à 750 000 euros d’amende depuis la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014).

Si la tromperie est une infraction instantanée, elle n’en constitue pas moins un délit clandestin par nature (Cass. crim., 7 juil. 2005, n° 05-81119), en ce qu’elle a pour but de laisser le consommateur dans l’ignorance des caractéristiques réelles du produit. Il en résulte que le délai de prescription court à compter de la date où la tromperie a été découverte et non de la date où les dissimulations sont intervenues depuis la mise sur le marché du médicament, le tribunal estimant que personne n'était en mesure de connaître l’ensemble des éléments nécessaires à la caractérisation de l’infraction avant le 7 février 2011, date des premières perquisitions au sein des laboratoires Servier.

La caractérisation de l’élément matériel a donné lieu à une motivation particulièrement détaillée (l’intention frauduleuse pouvant, quant à elle, résulter simplement de l’absence de vérifications et de diligences incombant aux prévenus, ou de leur connaissance des risques inhérents au médicament).

Le tribunal s’est attaché à reprendre l’historique du développement de la molécule de benfluorex depuis les années 60, en vue de connaître l’état des connaissances scientifiques existant lors de la période durant laquelle l’infraction doit être caractérisée. Selon lui, les laboratoires Servier connaissaient la nocivité de la norfenfluramine, métabolite actif responsable d’atteintes valvulopathiques et de cas d’hypertension artérielle pulmonaire, dès le développement du Mediator, ces risques étant clairement avérés à partir de 1995.

Les juges en ont conclu que les six sociétés du groupe Servier, poursuivies pour des faits commis à partir de juin 2001 et son directeur général – pour la période s’établissant de juin 1999 à novembre 2009, la relaxe lui étant accordée pour la période antérieure – étaient coupables du délit de tromperie aggravée. Compte tenu de l’extrême gravité des faits, les peines maximales ont été prononcées (375 000 euros d’amende pour chaque société, 75 000 euros d’amende et 4 ans d’emprisonnement avec sursis pour l’ancien directeur général).

Condamnations pour homicides et blessures involontaires

Les mêmes prévenus étaient poursuivis pour les délits d’homicides involontaires (C. pén., art. 221-6), et pour les délits ou les contraventions de blessures involontaires, selon que l’incapacité totale de travail de la victime est d’une durée inférieure ou égale à trois mois (C. pén., art. 222-19 et s.).

Ces infractions non intentionnelles supposent de réunir trois éléments constitutifs : une faute, un dommage et, pour chaque victime visée, l’existence d’un lien de causalité entre la faute et le dommage allégué.

Lorsque la cause de l’atteinte à la vie ou à l’intégrité physique est indirecte – cas intéressant des personnes physiques qui n’ont pas créé directement le dommage, mais qui ont contribué à créer ou laisser créer une situation dangereuse ayant permis sa réalisation ou n’ont pas pris les mesures nécessaires permettant de l’éviter – la culpabilité de ces personnes ne peut être retenue que sur le fondement d’une faute qualifiée. Il peut s’agir soit d’une faute délibérée, constituée par la méconnaissance d’une obligation de prudence ou d’une règle de sécurité, soit d’une faute caractérisée, exposant à un risque grave et pouvant résider dans un concours de fautes simples (telles des imprudences, des négligences ou des inattentions).

Les personnes morales sont en revanche responsables pénalement de toute faute d’imprudence ou de négligence non intentionnelle ayant entraîné une atteinte à l’intégrité physique constitutive des délits d’homicide ou blessures involontaires ainsi que des contraventions de blessures involontaires, alors même qu’en l’absence d’une faute délibérée ou caractérisée, la responsabilité pénale des personnes physiques ne peut pas être engagée.

Contrairement aux juges d’instruction qui avaient retenu une faute délibérée dans leur ordonnance de renvoi, le tribunal a estimé que les obligations de prudence et de sécurité prévues par les dispositions du code de la consommation n’étaient pas susceptibles d’être invoquées pour caractériser une violation délibérée, au sens des dispositions du code pénal.

En revanche, les dissimulations d’informations sont susceptibles de constituer, pour une personne physique, une faute caractérisée établissant une causalité indirecte, en ce qu’elles sont de nature à créer, ou contribuer à créer, les conditions permettant la survenue du dommage.

Le tribunal a considéré que les sociétés du groupe Servier et son directeur général avaient eu connaissance d’une inversion du rapport bénéfices sur risques du Mediator bien avant la suspension de son AMM en 2009 et qu’ils ont ainsi contribué – dès 1995 pour les sociétés du groupe – à créer les conditions permettant la réalisation du dommage en exposant les victimes à un risque qu’ils ont volontairement minimisé.

En vue d’établir l’existence d’un lien de causalité direct et certain entre la prise du médicament et la survenue de l’une deux pathologies à l’origine des dommages (valvulopathies et/ou hypertension artérielle pulmonaire), les juges ont exigé que les plaignants apportent la preuve d’une consommation estimée suffisante du produit, correspondant à une durée supérieure au seuil de 3 mois de traitement, susceptible d’induire des lésions.

Les six sociétés du groupe Servier ainsi que son directeur général ont été reconnus coupables des délits d’homicides et blessures involontaires et des contraventions de blessures involontaires à l’encontre de 93 victimes (une seule relaxe étant prononcée à l’égard d’une victime).

Venant aux droits de l’ex-AFSSAPS, l’ANSM était également poursuivie, en tant que personne morale, pour les délits d’homicides involontaires et blessures involontaires, ainsi que pour les contraventions de blessures involontaires. L’établissement public a été reconnu coupable de ces infractions, caractérisées par des imprudences et des négligences itératives, notamment en matière de pharmacovigilance.

On soulignera que si la jurisprudence administrative a reconnu la responsabilité de l’Etat pour la carence fautive de l’agence à ne pas suspendre ou retirer l’AMM du Mediator à compter de juillet 1999 (CE, 9 nov. 2016, n° 393904), le tribunal judiciaire de Paris a considéré que l’agence aurait dû intervenir dès septembre 1998 (une relaxe étant prononcée pour des faits antérieurs à cette date).

Condamnations et relaxes pour les délits d’atteinte à la probité

Eu égard aux liens qu’elles entretenaient avec des sociétés du groupe Servier, d’autres personnes étaient poursuivies pour des infractions liées à la probité.

Le délit de prise illégale d’intérêts visé à l’article 432-12 du code pénal était reproché à cinq anciens experts ayant occupé des fonctions au sein de la commission d’AMM de l’agence, du comité économique des produits de santé et de la commission de la transparence, la complicité du délit impliquant en outre deux sociétés du groupe Servier.

Un ancien membre de la commission d’AMM a été reconnu coupable et condamné à une peine d’amende et d’emprisonnement avec sursis, les autres prévenus bénéficiant de la relaxe en l’absence d’éléments matériels ou en raison de la prescription des faits.

L’une personnes relaxées a toutefois été condamnée, en tant qu’ancien vice-président de la commission de la transparence, pour le délit de pantouflage défini à l’article 432-13 du code pénal. La complicité de ce délit a également été retenue pour deux filiales du groupe Servier.

Le délit de pantouflage était par ailleurs reproché à deux anciens responsables de l’agence, l’un ayant exercé la fonction de directeur de l’évaluation des médicaments, l’autre celle de président de la commission d’AMM. La prise illégale d’intérêts avant l’expiration d’un délai de carence suivant la cessation d’une fonction de surveillance a été constatée pour le premier sur la période du premier semestre 2001 (il a été condamné à une peine de 18 mois d’emprisonnement avec sursis et 30 000 euros d’amende). Le second a été relaxé, les charges de pantouflage étant jugées prescrites.

La complicité du délit de pantouflage reprochée au secrétaire général du groupe Servier a été reconnue et sanctionnée par une peine analogue de 18 mois d’emprisonnement avec sursis et 30 000 euros d’amende.

Poursuivie pour recel de prise illégale d’intérêts, l’épouse avocate d’un ancien responsable de l’agence, décédé avant le procès, a été relaxée, la prise illégale d’intérêts de son mari avec l’une des sociétés du groupe Servier n’ayant pu être démontrée.

Indemnisation des préjudices résultant de la tromperie et des homicides ou blessures involontaires

Sur les 6657 parties civiles recensées lors du procès, la très grande majorité était des personnes physiques constituées pour le délit de tromperie (à ce dernier titre, plus de 4400 victimes directes ont demandé réparation du préjudice moral et/ou d’anxiété). Une centaine de personnes s’étaient constituées parties civiles pour des demandes afférentes aux blessures ou homicides involontaires.

Les six sociétés du groupe Servier et son ancien directeur général ont été déclarés solidairement responsables et condamnés à indemniser les victimes des préjudices résultant des délits constitués.

Plusieurs demandes indemnitaires ont été rejetées faute d’avoir été chiffrées, tandis que d’autres ont été jugées irrecevables lorsque l’exposition au Mediator n’était pas documentée.

De nombreuses victimes directes de la tromperie ont été indemnisées, jusqu’à 60 000 euros pour le préjudice d’anxiété et 10 000 euros pour le dol contractuel. Certaines victimes n’ayant pas invoqué le préjudice d’anxiété ont pu être indemnisées à hauteur de 60 000 euros de leur préjudice moral.

Des victimes ayant déjà été indemnisées de leurs préjudices corporels par voie de transaction avec les laboratoires Servier ont également pu obtenir une indemnisation mise à la charge de l’ancien directeur général, à hauteur de 20 000 euros au titre du dol contractuel et du préjudice d’anxiété. Les victimes indirectes (conjoints et enfants) qui s’étaient constituées parties civiles ont pu obtenir jusqu’à 15 000 euros au titre de leur préjudice moral.

Le montant cumulé des condamnations civiles s’élève à près de 180 millions d’euros, somme qui apparaît sensiblement inférieure à celle qui était globalement demandée par les victimes.

L’affaire du Mediator est cependant loin d’être terminée, puisque la cour d’appel de Paris aura à se prononcer, tant sur le volet pénal que sur le volet civil, à l’occasion d’un nouveau procès. Il convient par ailleurs de tenir compte du recours introduit par la société Servier devant la juridiction administrative visant à obtenir de l’Etat – jugé responsable de la carence fautive de l’ex-AFSSAPS – qu’il assume une prise en charge partielle des sommes versées par le laboratoire au titre des indemnisations civiles.

Jérôme Peigné, Professeur à l'université Paris Descartes
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